AFRIQUE DE L’OUEST : TRAFIC AUTO DÉMANTELÉ

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C’est un coup de filet digne d’un polar transcontinental. Pendant deux semaines, du 17 au 30 mars 2025, une opération coordonnée par Interpol, baptisée Operation Wheel, a permis de lever le voile sur l’un des plus vastes réseaux de voitures volées opérant entre l’Occident et l’Afrique de l’Ouest. Douze pays africains — du Nigeria au Bénin, en passant par le Ghana ou encore le Togo — ont mobilisé leurs forces pour traquer les véhicules devenus monnaies d’échange dans un trafic tentaculaire.

Un réseau international de voitures volées tombe en Afrique de l’Ouest.

Des berlines de luxe comme passeport du crime

Toyota Lexus, Peugeot dernier cri, Honda Civic en version sport… Ce ne sont pas de simples véhicules, mais de véritables jetons dans une économie parallèle. En tout, plus de 75 voitures ont été saisies et 150 identifiées comme volées, certaines à des milliers de kilomètres, au Canada ou en Europe. Derrière chaque moteur, une histoire : celle d’un propriétaire canadien dépossédé, d’un port africain corrompu, d’un conteneur maquillé… et d’un réseau aux ramifications bien huilées.

Interpol le confirme : « Le vol d’un véhicule n’est que la première étape d’un long périple criminel. » Ces voitures n’ont pas seulement vocation à rouler. Elles sont aussi échangées contre armes, drogue, voire contre des faveurs politiques ou des postes dans certaines régions instables. Le crime organisé trouve dans l’automobile un outil de mobilité… et de blanchiment.

Des ports aux bases de données : la contre-offensive s’organise

Si l’Afrique de l’Ouest devient un hub de ce trafic, c’est en grande partie à cause de ses ports et de ses frontières poreuses. Mais cette fois, la riposte a été musclée. À Lagos, six Toyota Lexus ont été interceptées dans des conteneurs en partance, pendant qu’au Ghana, plus de 12 600 véhicules étaient minutieusement contrôlés via la base VVS d’Interpol, une technologie capable de croiser instantanément les données de 137 pays.

Chaque contrôle est une tentative de remonter le fil invisible d’un vol commis à Montréal, Paris ou Rotterdam. Chaque saisie est une victoire sur un marché noir qui, selon certaines estimations, génère plusieurs milliards de dollars par an.

Un trafic à double visage

Au-delà de l’aspect criminel, ce trafic interroge aussi sur les failles des systèmes douaniers, la complicité silencieuse de certains agents locaux et la naïveté de citoyens qui achètent des véhicules sans en connaître la provenance. Car une partie de ces voitures est vendue à des particuliers, à prix cassé, parfois même avec des documents falsifiés en bonne et due forme.

Pour Interpol, le véritable défi commence maintenant : démanteler les deux organisations identifiées lors de l’opération, tracer les circuits financiers et empêcher que ces réseaux ne ressurgissent ailleurs, sous une autre forme. Car dans l’ombre des phares rutilants et des carrosseries brillantes, ce sont des flux de pouvoir, de violence et d’argent qui circulent sans frontières.

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