Une délégation du Fonds monétaire international (FMI) conduite par Cemile Sancak est au Cameroun du 3 au 16 octobre 2024 dans le cadre de la 7e revue du Programme économique et financier soutenu par la Facilité élargie de crédit (FEC) et le Mécanisme élargi de crédit (MEC). A l’issue d’une audience avec le ministre délégué auprès du ministre des Finances, Yaouba Abdoulaye, le 6 octobre 2024, l’émissaire du FMI a évoqué dans la foulée, entre autres points, la suppression totale des subventions sur le carburant.

Comprendre la position du Fonds monétaire international
Selon le site d’information echo matin, Le Fonds monétaire international (FMI) presse le Cameroun de supprimer définitivement les subventions sur les carburants, malgré deux hausses successives des prix du carburant à la pompe enregistrées en l’espace d’un an. Face à cette pression, le gouvernement, bien que hésitant, pourrait être contraint d’abandonner les subventions en 2025, afin d’assurer la soutenabilité de ses finances publiques.
Cemile Sancak salue certes les efforts du gouvernement pour avoir relevé à deux reprises les prix à la pompe, mais tous les objectifs fixés dès le départ n’ont pas encore été atteints. « Il y a plusieurs réussites du programme. Il y a aussi des réformes qui restent pour arriver aux objectifs globaux du programme. Concernant les prix à la pompe, les autorités ont diminué la majorité de la subvention. Donc, il y a eu deux augmentations des prix à la pompe et maintenant la subvention qui reste est bien réduite. En effet, dans le programme, on a défini l’élimination des subventions », a-t-elle précisé.

Notons qu’entre février 2023 et février 2024, le gouvernement camerounais a entériné deux hausses des prix de certains produits pétroliers. La première est intervenue en février 2023 et la seconde un an après. Le prix du litre du super est passé de 630 Fcfa au 31 janvier 2023 à 840 Fcfa au 2 février 2024 (après 730 Fcfa) soit une hausse de 210 Fcfa (+33,3%) en l’espace d’un an tandis que le litre du gasoil coûte 828 Fcfa à la pompe depuis le 3 février 2024 contre 575 Fcfa jusqu’au 31 janvier 2023 puis 720 Fcfa à compter le lendemain. Les prix du gaz (6 500 Fcfa) et du pétrole lampant (350 Fcfa) sont restés inchangés.
Vers une nouvelle hausse des prix à la pompe ?
L’hypothèse d’une éventuelle nouvelle augmentation des prix à la pompe au Cameroun n’est pas à balayer du revers de la main au regard de l’insistance du FMI sur la question de la suppression des subventions. L’institution de Bretton Woods a d’ailleurs prorogé de 1 an (jusqu’en juillet 2025) le programme économique et financier initialement prévu pour s’achever en juillet 2024. Mais cette prorogation qui s’accompagne d’un financement supplémentaire de 145,4 millions de dollars (près de 89 milliards de Fcfa) est conditionnée par la mise en œuvre des réformes visant à soutenir le secteur privé, élargir l’assiette des recettes et améliorer la soutenabilité des finances publiques.
80 milliards de Fcfa de subvention en 2025

De l’autre côté, le gouvernement camerounais longtemps resté réticent à l’idée de la suppression totale des subventions des produits pétroliers, n’aura certainement pas d’autre choix que de céder, vu la courbe décroissante de l’enveloppe dédiée au soutien des prix à la pompe.
Selon les chiffres officiels, le pays a dépensé 1 000 milliards de Fcfa en 2022 contre 640 milliards de Fcfa en 2023 (pour une projection de 453,3 milliards de Fcfa) soit une baisse de 360 milliards de Fcfa en glissement annuel, pour soutenir les prix du carburant et du gaz domestique. En 2024, le document de programmation économique et budgétaire table sur une subvention de 263,3 milliards de Fcfa. Celle-ci, d’après la même source, devrait encore diminuer pour s’établir à 80 milliards de Fcfa en 2025. Toute chose qui ferait baisser l’enveloppe des transferts et subventions prévue à 1 156,4 milliards en 2024 contre 1 034,7 milliards en 2025.
Sous ce rapport, l’Etat n’aura certainement pas d’autre alternative que de renoncer à la subvention et de procéder à une nouvelle augmentation des prix à la pompe pour ne pas être asphyxié. Pour la Banque mondiale, « les subventions sont mal ciblées en ce qui concerne les couches vulnérables, et ont un effet d’éviction sur les dépenses prioritaires. A titre d’illustration, les subventions aux prix des produits pétroliers représentent six fois le budget alloué à l’agriculture, quatre fois celui de la santé et plus de trois fois celui de l’énergie et de l’eau ».