À l’occasion de la 18ᵉ Journée mondiale dédiée à la lutte contre le paludisme, célébrée ce 25 avril, le Cameroun a réaffirmé sa détermination à en finir avec cette maladie d’ici à 2030. Célébrée cette année sous le thème: « Le paludisme se termine avec nous » : Réinvestir, réimaginer, rallumer». Ce thème vise à sensibiliser aux actions urgentes nécessaires dans la lutte contre le paludisme, en soulignant l’importance d’un investissement, d’une innovation, d’une collaboration et d’un engagement continus de la part de la communauté mondiale de l’éradication du paludisme. Le Ministre de la Santé Publique, Dr Malachie Manaouda, a profité de cette journée pour faire le point sur la situation nationale, entre avancées notables et défis persistants.

Une menace toujours présente, mais pas insurmontable
Avec environ 6,7 millions de cas enregistrés chaque année et près de 6 000 décès, le paludisme reste la première cause de décès et de maladies au Cameroun. Les enfants de moins de cinq ans ainsi que les femmes enceintes demeurent les plus exposés. Le Dr Manaouda a souligné que derrière chaque chiffre se cache une vie brisée, insistant sur l’urgence d’intensifier les actions. Pour répondre à cette situation alarmante, les autorités sanitaires ont mis en place une stratégie diversifiée incluant:
• la distribution de moustiquaires imprégnées
• la chimio-prévention saisonnière dans les régions du Nord
• le traitement préventif chez les femmes enceintes,
• L’utilisation de moustiquaires de nouvelle génération
• et l’introduction, depuis janvier 2024, du vaccin antipaludique RTS,S dans 42 districts sanitaires.

Un vaccin bien accueilli par les communautés
Ce vaccin, déjà testé avec succès dans d’autres pays africains, suscite de grands espoirs parmi les populations. Il a été testé dans 42 districts sanitaires. Ce vaccin vient compléter les outils existants et redonne de l’espoir aux populations. L’intégration du vaccin dans le calendrier vaccinal de routine a été saluée par les populations, en particulier dans les zones rurales. Les agents de santé communautaires jouent un rôle essentiel dans la sensibilisation et la mobilisation autour de cette nouvelle mesure de prévention. Les collectivités locales sont également mises à contribution pour relayer les messages de santé publique et encourager l’adhésion.
Un appel à la responsabilité collective
Dans un discours empreint d’espoir, le ministre a lancé un appel à l’engagement de tous les Camerounais. Pour lui, la lutte contre le paludisme doit devenir une affaire nationale : « C’est ensemble que nous mettrons fin à cette maladie », a-t-il déclaré. Le Cameroun se donne donc les moyens de transformer, à terme, ce fléau historique en simple souvenir. La mobilisation reste la clé.
Autonomie financière face aux incertitudes de l’aide internationale
Face à la suspension temporaire de l’aide américaine en 2024, le Cameroun a démontré sa résilience. Le gouvernement a garanti la continuité des soins et s’est engagé à renforcer l’autofinancement de ses programmes sanitaires. « Aucun malade n’a été laissé sans traitement », a affirmé Dr Malachie Manaouda.Le Ministre a également lancé un appel à la mobilisation nationale : « Le paludisme s’arrête avec nous. » Un message fort pour rappeler que chaque citoyen a un rôle à jouer, du respect des mesures de prévention à la participation active aux campagnes de sensibilisation.
Avancées scientifiques majeures : vaccins, moustiques modifiés et innovations biologiques
La recherche contre le paludisme connaît un tournant décisif. Outre le vaccin RTS,S, un second vaccin plus efficace, le R21/Matrix-M, a été validé par l’OMS en 2023. Mis au point par l’Université d’Oxford et produit à grande échelle en Inde, il affiche une efficacité supérieure à 75 %. Par ailleurs, des solutions de rupture émergent, telles que :
• Les moustiques génétiquement modifiés. Au Burkina Faso, des chercheurs du projet Target Malaria ont libéré des moustiques mâles stériles dans la nature, pour limiter la reproduction des vecteurs de la maladie.
• L’utilisation de bactéries Wolbachia injectées dans les moustiques, méthode qui empêche la transmission du parasite. Cette technique est déjà testée avec succès dans la lutte contre d’autres maladies vectorielles (comme la dengue) et suscite un fort intérêt pour le paludisme.
• L’amélioration des tests de diagnostic rapides et le déploiement de médicaments antipaludiques à action prolongée, notamment chez les enfants.

L’impact de la maladie en Afrique
Le paludisme continue de sévir, surtout sur le continent africain qui concentre 94 % des cas mondiaux et 95 % des décès liés à la maladie selon le dernier rapport de l’OMS. En 2022, plus de 249 millions de cas ont été recensés dans le monde, dont 608 000 décès. L’Afrique subsaharienne paie le plus lourd tribut, avec les enfants de moins de cinq ans représentant environ 80 % des victimes.
Liste des 45 pays et 1 territoire certifiés exempts de paludisme par l’OMS (jusqu’en janvier 2025)
Afrique: Maurice (1973), Algérie (2019), Cap-Vert (2024), Égypte (2024)
Méditerranée orientale: Jordanie (2012), Maroc (2010), Émirats arabes unis (2007)
Europe: Arménie (2011), Azerbaïdjan (2023), Bosnie-Herzégovine (1973), Bulgarie (1965), Croatie (1973) Chypre (1967), La Réunion (France) (1979), Hongrie (1964), Italie (1970), Kirghizistan (2016) Monténégro (1973), Pays-Bas (1970), Pologne (1967), Portugal (1973), Macédoine du Nord (1973), Roumanie (1967), Serbie (1973), Slovaquie (1963), Slovénie (1973), Espagne (1964), Suède (1963), Turkménistan (2010), Ouzbékistan (2018), Géorgie (2025)
Amériques: Argentine (2019), Belize (2023), Cuba (1973), Dominique (1966), El Salvador (2021), Grenade (1962), Jamaïque (1966), Paraguay (2018), Sainte-Lucie (1962), Trinité-et-Tobago (1965), États-Unis d’Amérique (1970)
Asie du Sud-Est: Maldives (2015), Sri Lanka (2016)Pacifique occidental, Australie (1981), Brunei Darussalam (1987), Chine (2021), Singapour (1982)
Ces succès rappellent que l’élimination du paludisme n’est pas une utopie, mais un objectif réalisable avec des stratégies adaptées et une mobilisation de tous les acteurs.
Une dynamique continentale à maintenir
Le combat contre le paludisme s’accélère en Afrique, où des dizaines de pays ont renforcé leurs politiques de santé publique, appuyées par des financements internationaux (GAVI, OMS, Fonds mondial) mais aussi par une volonté croissante d’autonomisation.En se joignant aux initiatives innovantes, en investissant dans la recherche locale et en misant sur les communautés, le Cameroun espère inscrire son nom parmi les pays africains qui auront tourné la page du paludisme d’ici 2030.