Le Rwanda a annoncé son retrait de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), dénonçant une « dérive institutionnelle » qu’il estime favorable à la République démocratique du Congo (RDC). Cette décision intervient dans un contexte de fortes tensions liées au conflit armé dans l’est congolais, où Kigali est régulièrement accusé de soutenir les rebelles du M23.

Depuis le début de l’année, les forces du M23 – un mouvement rebelle que l’ONU et Washington disent appuyé militairement par le Rwanda – ont conquis plusieurs villes stratégiques dans l’est de la RDC. Le conflit a déjà coûté la vie à plusieurs milliers de civils. Malgré les dénégations de Kigali, la communauté internationale, notamment la Belgique, critique ouvertement son rôle dans cette escalade.
Le samedi 7 juin à Malabo, lors du 26ᵉ sommet ordinaire de la CEEAC, les chefs d’État ont décidé de prolonger le mandat du président équato-guinéen, Teodoro Obiang Nguema, à la tête de l’organisation. Une décision qui a suscité l’indignation du Rwanda, qui devait normalement assurer la présidence tournante cette année.
Selon un commissaire de la CEEAC interrogé anonymement par l’AFP, la situation a donné lieu à de vifs échanges entre les ministres rwandais et congolais. Ce dernier aurait notamment déclaré qu’un Rwanda à la tête de l’organisation rendrait impossible la participation de la RDC aux activités régionales. Le Burundi aurait exprimé des réserves similaires.
Dans un communiqué cinglant, la diplomatie rwandaise a fustigé ce qu’elle considère comme une mise à l’écart orchestrée : « Le droit du Rwanda à la présidence rotative a été délibérément ignoré pour imposer le diktat de la RDC. » Kigali estime que la CEEAC ne remplit plus son rôle d’intégration régionale de manière neutre et utile.
Le ministre rwandais des Affaires étrangères, Olivier Nduhungirehe, a dénoncé sur le réseau X (ex-Twitter) une hypocrisie de la part de Kinshasa, qui selon lui multiplie les plaintes dans les forums régionaux tout en poursuivant les discussions bilatérales avec le Rwanda : « Il est incroyable et inacceptable de constater que la RDC, tout en participant aux efforts diplomatiques, continue de nous accuser et de demander des sanctions. »
Pour rappel, les présidents Paul Kagame et Félix Tshisekedi s’étaient rencontrés en mars dernier au Qatar afin de discuter d’un éventuel cessez-le-feu. Des pourparlers facilités par les États-Unis sont également en cours.
Ce retrait du Rwanda, pays influent de la région, risque de fragiliser davantage la CEEAC, déjà confrontée à de nombreuses divisions internes et à un manque de cohésion sur les grands dossiers sécuritaires du continent.