Le président rwandais Paul Kagame a déclaré à CNN qu’il ne savait pas si des troupes de son pays se trouvaient dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), où les combats entre le groupe armé M23 et les soldats congolais ont fait plus de 700 morts et des milliers de blessés ces derniers jours.
Une grande partie de la communauté internationale estime que le Rwanda soutient les rebelles du M23, qui ont affirmé avoir capturé la ville de Goma, dans l’est du Congo, la semaine dernière. Des experts de l’ONU estiment qu’entre 3 000 et 4 000 soldats rwandais supervisent et soutiennent les combattants du M23 dans l’est de la RDC, surpassant en nombre les forces du groupe rebelle dans le pays.
Dans une interview exclusive accordée à CNN lundi, Kagame a été interrogé sur la présence éventuelle de troupes rwandaises en RDC.« Je ne sais pas », a répondu Kagame, bien qu’il soit commandant en chef des Forces de défense rwandaises.« Il y a beaucoup de choses que je ne sais pas. Mais si vous me demandez s’il y a un problème au Congo qui concerne le Rwanda, et si le Rwanda ferait tout pour se protéger, je répondrais à 100 % oui », a-t-il ajouté. La position de Kagame a été réitérée par le groupe rebelle, dont le porte-parole, Victor Tesongo, a déclaré à CNN que le M23 « ne reçoit aucun soutien du Rwanda », qualifiant cette hypothèse de « manipulation de l’opinion publique pour nous discréditer ».Tesongo a affirmé que le Rwanda était davantage préoccupé par « sa lutte contre les FDLR (Forces démocratiques de libération du Rwanda), qui sont alliées au gouvernement congolais et utilisées contre la sécurité du Rwanda »
.Le ministre congolais de la Communication, Patrick Muyaya, a déclaré lundi à CNN que la présence militaire du Rwanda en RDC était bien documentée, affirmant que « Kagame est la seule voix qui le nie ».« Au cours des dix derniers jours, le Groupe d’experts de l’ONU, le Conseil de sécurité de l’ONU, le Secrétaire général de l’ONU, le président João Lourenço (de l’Angola) et la SADC (Communauté de développement de l’Afrique australe) ont tous confirmé la présence militaire du Rwanda dans l’est de la RDC. Kagame est la seule voix qui le nie », a déclaré Muyaya en réponse à l’interview de Kagame sur CNN, ajoutant que « le consensus international écrasant ne laisse aucun doute ».
Larry Madowo de CNN a comparé Kagame au président russe Vladimir Poutine, qui avait soutenu les forces séparatistes locales pour tenter d’envahir le Donbass, une région de l’est de l’Ukraine, en 2014.« Il y aura toujours des histoires », a réagi Kagame face à cette comparaison, ajoutant qu’il ne peut pas « empêcher les gens de dire ce qu’ils veulent dire ».« On peut m’appeler comme on veut – que puis-je y faire ? », a-t-il demandé. « Nous devons faire ce que nous devons faire… nous devons nous assurer de survivre à toutes les tempêtes qui frappent notre pays. »Kagame a qualifié les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), l’un des plus grands groupes armés étrangers opérant en RDC, de « menace existentielle » pour le Rwanda. Il a affirmé que ce groupe était pleinement intégré aux forces armées congolaises, suggérant que d’autres gouvernements de la région le soutenaient également. Kagame a insisté à plusieurs reprises sur le fait que le Rwanda fera « tout ce qui est nécessaire » pour se protéger, sans donner plus de détails sur ce que cela implique.« Personne », y compris les Nations unies ou la communauté internationale, « ne le fera à notre place », a-t-il déclaré.
Lorsqu’on lui a de nouveau demandé s’il envoyait des troupes en RDC, Kagame a répondu que le Rwanda ferait « tout pour se protéger », disant à Madowo : « Interprétez mes propos comme vous le voulez. »
Le conflit latent entre le Rwanda et la RDC, qui partagent une frontière, s’est intensifié avec l’avancée du M23 vers Goma.La porte-parole du gouvernement rwandais, Yolande Makolo, a déclaré à CNN que, depuis lundi, 16 personnes avaient été tuées au Rwanda « à cause des tirs d’obus provenant des combats à Goma ».La semaine dernière, le président congolais Félix Tshisekedi a promis « une réponse vigoureuse et coordonnée » contre le M23, qualifiant le groupe de « marionnette du Rwanda ».
L’alliance rebelle a déclaré à CNN qu’elle travaillait à « installer une nouvelle administration » à Goma et qu’elle prévoyait de conquérir d’autres territoires, y compris la province voisine du Sud-Kivu et la capitale nationale, Kinshasa.« En réalité, notre lutte ne peut pas se limiter à Goma, l’objectif reste de renverser Tshisekedi et d’installer une nouvelle direction capable de trouver des solutions aux problèmes de notre peuple », a déclaré son porte-parole, Tesongo.
