Le 3 mai 2025, le Togo a franchi une étape cruciale de son histoire politique avec l’élection de Jean-Lucien Savi de Tové à la présidence de la République. Cette désignation intervient dans un contexte inédit : le passage du pays à la Cinquième République, après l’adoption d’une nouvelle Constitution en 2024. Cette réforme majeure transforme le système politique togolais en instaurant un régime parlementaire, mettant ainsi fin à plusieurs décennies de régime présidentiel fort.

Dans ce nouveau cadre, le rôle du président de la République devient essentiellement symbolique, tandis que les pleins pouvoirs exécutifs reviennent au président du Conseil des ministres. Faure Gnassingbé, chef de l’État depuis 2005, a été élu à cette fonction exécutive clé, conservant ainsi une position de force dans l’appareil d’État. Cette redistribution des rôles marque une volonté de réforme politique, mais suscite aussi des interrogations quant à l’équilibre réel des pouvoirs.
Un geste d’ouverture et de réconciliation nationale
Jean-Lucien Savi de Tové, unique candidat en lice, a été élu à l’unanimité par les 150 membres du Congrès, composé des députés et des sénateurs togolais. Figure emblématique de l’opposition historique, Savi de Tové est un homme au parcours politique riche et singulier. Né le 7 mai 1939 à Lomé, diplômé en droit de l’université de Bordeaux, il a été ministre du Commerce, de l’Industrie et de l’Artisanat entre 2005 et 2007. Il fut aussi emprisonné en 1979 pour tentative présumée de complot contre le régime d’alors, ce qui a renforcé son image d’homme d’État résilient et engagé.Sa nomination à la magistrature suprême, bien que largement honorifique dans la nouvelle configuration, est interprétée par beaucoup comme un geste fort de réconciliation nationale. Elle symbolise une volonté d’ouverture politique et de reconnaissance des voix longtemps marginalisées. Toutefois, certaines critiques soulignent que cette élection, en l’absence d’opposition ou de véritable scrutin populaire, pourrait également servir à renforcer la légitimité du pouvoir en place, tout en maintenant l’essentiel du contrôle entre les mains de Faure Gnassingbé.
Malgré ces réserves, l’arrivée de Jean-Lucien Savi de Tové à la présidence ouvre un nouveau chapitre dans l’histoire du Togo. Elle pourrait offrir une chance de dialogue renouvelé entre les forces politiques et contribuer à apaiser un climat politique longtemps marqué par la méfiance et les tensions. Le défi sera désormais de faire vivre cette nouvelle République en conciliant symboles et réalités du pouvoir.