C’est dans le nord de la Turquie, à Karabük précisément que s’est ouvert ce 8 novembre le procès du meurtre de « Dina » Danys Dinabongho Ibouanga, étudiante gabonaise de 17 ans retrouver dans une rivière en mars dernier. Au départ la police évoquait un suicide mais après avoir été contraint d’ouvrir une enquête en raison de l’émoi, plusieurs personnes avaient été placées en garde à vue. Un seul homme comparaît finalement, et de nombreuses questions demeurent sans réponses.
L’accusé, un homme âgé de 55ans. Sur les images de vidéosurveillance, Dina saute de son véhicule, puis par-dessus un grillage près de la rivière dans laquelle son corps a été retrouvé. Le suspect aurait passé sept minutes au bord du cours d’eau avant de partir, selon l’acte d’accusation.
Le père de Dina, Guy serge Ibouanga parle de gangs, car selon sa famille et des associations féministes turques qui la soutiennent, elle avait reçu des messages à caractère sexuel, dénoncé un harcèlement et des comportements racistes.
Plus de sept mois après cette tragédie, il se confie à nos confrères à la veille de l’ouverture du procès :
« Dina était notre unique enfant, Dina est partie pour des études d’ingénierie mécanique. Si nous savions qu’en Turquie, il y a des gangs qui sévissent dans les rues de Karabük, on n’aurait jamais ne serait-ce que penser envoyer notre fille en études dans ce pays. Donc nous demandons que justice se fasse pour montrer au monde entier que Dina ne méritait pas cela. »
Alors, qu’est-il arrivé à Dina ? Pourquoi s’est-elle enfuie en courant de son immeuble dans la nuit du 25 au 26 mars dernier ? Pourquoi a-t-elle sauté de la voiture dans laquelle elle était montée, celle du principal suspect ? Que lui est-arrivé ensuite ? Autant de questions auxquelles l’enquête n’a pas répondu. Et c’est ce que dénoncent les avocates du groupe « Les féministes pour Dina », qui se sont rendues près de la rivière où le corps a été trouvé.
L’une d’elle, assistait à la première audience ce mercredi. Selon sa théorie et sa description détaillée, il est impossible que Dina se soit retrouvée accidentellement dans la rivière après avoir sauté de la voiture et du grillage. Elle a également critiqué le rapport du procureur qui, selon elle, ne fournit pas suffisamment d’informations. Elle a suggéré que le tribunal devrait se rendre sur les lieux pour comprendre la situation de manière plus approfondie.
Pour l’avocate, ce procès revêt une importance capitale. Elle estime que ce qui est arrivé à Dina est le résultat cumulé des violences du patriarcat et de celles liées à la xénophobie dont sont victimes les migrants. Pour elle, ce procès représente donc un enjeu politique majeur, à la fois pour changer ce système et pour qu’il n’y ait pas d’autres Dina.
Le principal suspect a été maintenu en détention à l’issue de l’audience. Le ministère turc de la Famille s’est constitué partie civile. La prochaine audience aura lieu le 24 janvier 2024.